Les pieds de Julien se sont posés sur le sable de Malo-les-Bains, quartier de Dunkerque. Moi j’ai gardé mes chaussures et mes yeux bien grands ouverts.
La mer, celle du Nord, après trois mois de voyage. Un plaisir de mâcher le fromage local en la regardant. Nos fesses refroidissent sur les assises en pierre de la plage de Malo-les-Bains. Le dessin filiforme de la mer à quelques mètres, nous nous enfonçons dans le sable fin. Sous mes baskets les coquilles de couteau se brisent. Ici, 340 000 soldats anglais et français rejoignirent l’Angleterre en 1940.


Ma chips est tombée au sol. Quel malheur. Face à moi, la mouette piaille et rameute toute la smala. Rapidement nous nous trouvons encerclés par les plumés. Ils se chiffonnent, se battent pour un bout de pas grand chose. Une animation comme une autre, en cette terre qui n’a pas tremblé au rythme de son carnaval depuis deux ans. Ici, furent tournées des scènes du film « Dunkerque » de Christopher Nolan, revenant sur cette opération Dynamo.
Architecture, bombardements et crème glacée
Ensoleillée, Martine, les Glycines, Mon plaisir. Les villas de ce quartier dunkerquois portent des petits noms. Celle de Gaspard Malo se nommait la Belle-Plage. Le capitaine, constructeur de navire et député d’un jour, rachète 657 hectares de dunes à la commune en 1858. Ses tentatives agricoles restant infructueuses, il revendra les terres pour que Dunkerque s’agrandisse, et que les constructions prospèrent. Il a laissé son nom en souvenir. De nombreuses bâtisses ont été emportées par la guerre, mais la diversité architecturale y est toujours époustouflante.
Néo-gothique, art Nouveau, art déco, néo-flamand et anglo-normand. Chalets suisses, palais corinthiens, pagodes chinoises, chaumières normandes ou encore villas orientales. La cité balnéaires a de nombreuses facettes.
Ce tronçon de mer fut fréquenté par des artistes, écrivains. Il était un lieu de villégiature apprécié d’une population aux bourses bien remplies. Festif, joyeux. Mais aussi martyr des deux guerres. Laurentine Bart, institutrice, écrivait en 1940 : « Ce matin à 5h30, bombardement à la plage de Malo : une quinzaine de bombes ont été jetées par trois appareils nazis sur des navires, devant le casino. Les vitres de celui-ci ont été brisées. Émoi parmi la population qui commence à s’éclaircir. »



Petits carrés bleu et blanc, plantés dans le sable à distance égale. La touche rétro des cabines de plage s’accorde parfaitement à l’ambiance. Sous une villa de briques colorées, aux touches de vert et au chapeau pointu, trône un magasin de glaces à l’américaine. Un cône géant pour devanture, une lignée d’étoile blanche sur fond rouge pour liseré.


Malo-les-Bains est un lieu de contraste, où l’on peut manger une crème glacée écoeurante, un cornet de frites fraîches, humer l’air marin, tout en repensant aux soldats qui ont foulé le sable qui se colle à nos orteils.
Un avis sur « Récit n°69 – Méli-Malo »